Nous tenons d’abord à remercier chaleureusement tous ceux qui nous ont partagé leurs commentaires dans ce billet. Vous nous avez inspirés dans notre réflexion sur le rôle de l’école de demain.
Nous tenons à remercier également Mario Asselin et la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement (FQDE) pour leur confiance. Le billet suivant se trouve également dans leur blog ainsi que dans leur revue imprimée.
Nous espérons qu’il stimulera des discussions menant à une actualisation nécessaire des gens impliqués dans l’éducation de nos jeunes, des processus pédagogiques et des systèmes à exploiter.
Comme nous le soulignions, affaires et écoles sont deux environnements avec les mêmes défis à relever.
Betty (étudiante) “Je fais votre éducation.”
Mme Watson (enseignante) “Ça c’est mon travail!”
Le sourire de Mona Lisa est un film qui raconte les défis d’une professeur d’art avec une classe d’étudiantes intelligentes dans une université privée des plus conservatrices.
L’histoire a beau se situer dans les années 50, il rassemble toutes les conditions auxquelles font face les professeurs d’aujourd’hui à cause de l’Internet:
- une professeur dédiée et passionnée à permettre aux étudiantes “de découvrir le rôle respectif auxquelles elles sont nées”
- des étudiantes disposant de sources de connaissances leur permettant de confronter celles du professeur
- une blogueuse influente qui ne se gêne pas pour critiquer ouvertement tout ce qu’elle observe;
- une direction incapable d’ajuster le cadre pour permettre à une leader d’aider ses étudiantes à “rechercher la vérité au-delà des traditions, au-delà de la définition et au-delà de l’image!”
Le film se termine avec un doute et non un sourire: le doute que le système en place puisse permettre aux étudiantes de développer au maximum leur curiosité, leur confiance en eux-mêmes et leur capacité de “lire” au-delà des conventions. Le doute que le système en place permettent à ces personnes d’évoluer et de faire évoluer la société.
Partage en toute humilité
À partir de deux(2) perspectives différentes d’une même société et d’un même système scolaire, un entrepreneur et une future enseignante, un père et sa fille s’unissent pour partager leur passion commune: rendre les chefs de PME et les élèves (étudiants) plus curieux, plus confiants, mieux outillés pour profiter des opportunités et pour minimiser les risques qui évoluent de plus en plus rapidement autour de nous.
Ce billet vise simplement à stimuler une synergie entre les leaders curieux et passionnés pour actualiser le cadre que doit gérer l’école afin de favoriser le maximum d’apprentissages pour sa “clientèle”.
Mise en contexte
L’école vit une pression sans précédent à réviser son rôle et son mode de fonctionnement.
Elle doit composer avec la capacité limitée de payer de la société, le désengagement des parents, la gestion des “enfants rois”, l’intégration des élèves en difficulté d’apprentissage, la peur du changement, les habitudes forgées par le passé et le plan de carrière du personnel.
Comme si ce n’était pas suffisant, l’école doit décoder et exploiter les opportunités tout en minimisant les risques d’un environnement technologique qui évolue plus rapidement que la capacité d’assimilation de ses dirigeants et de ses enseignants: l’Internet.
Dans l’histoire de l’humanité, c’est la première fois où le savoir n’est pas réservé qu’à une élite. Chaque individu n’est limité que par sa capacité à se connecter à l’Internet et à lire (décoder) les informations qui sont disponibles. Les plus curieux évoluent plus rapidement de façon autonome et font la démonstration de plus en plus que “le savoir n’est plus l’exclusivité des enseignants”. Le maître serait-il devenu ignorant?
Même si elle peut s’appliquer à l’échelle d’un ministère ou d’une région, nous concentrerons notre réflexion sur l’école comme unité locale d’enseignement.
Avant son rôle, quelle est sa mission?
Le Programme de formation de l’école québécoise mentionne que la mission actuelle de l’école “s’articule autour de trois axes: instruire [avec une volonté réafirmée], socialiser [pour apprendre à mieux vivre ensemble] et qualifier [selon des voies diverses].” “ L’école québécoise a le mandat de préparer l’élève à contribuer à l’essor d’une société voulue démocratique et équitable.”
Personne n’est contre la vertu. Dans un document, cette mission est louable. Qu’en est-il avec l’Internet comme réalité avec laquelle composer? Qui doit déterminer quoi instruire, où socialiser et comment qualifier?
L’Internet n’est pas un média, un outil ou silo, mais un environnement de communication entre humains et systèmes qui influencent déjà tous les aspects de notre vie. Comment la mission de l’école peut permettre d’instruire vers l’autonomie, de socialiser aussi par le web et de qualifier pour faire évoluer la société dans cet environnement “organique”?
Dans ce contexte, est-ce que l’école est un lieu et un cadre pour enseigner des savoirs ou pour apprendre à les acquérir? Ce lieu et ce cadre doivent-ils être uniquement physiques? Sa mission est-elle de former des futurs leaders, des gens compétents à travailler ou des apprenants autonomes?
L’école doit-elle être la complice des intérêts économiques cherchant à combler des postes plutôt que de préparer l’élève (étudiant) à être maître de sa propre évolution tout en contribuant à celle de la société?
Le rôle de l’école de demain!
Valoriser la profession d’enseignant:
L’enseignant n’est pas un fonctionnaire disposant de trop de congés annuellement. Il n’est pas non plus un coût pour nos gouvernements et pour notre société ou un élément de convention collective à gérer.
Il est un puissant actif et responsable de l’épanouissement des savoirs des élèves(étudiants) qu’on lui confie. En Corée-du-Sud, il est considéré comme un bâtisseur de nation (Nation builder). Nous devrions le “voir” de la même façon chez nous.
L’école a un rôle fondamental à jouer dans la perception que notre société doit avoir de cette profession à la base de notre richesse collective. Elle doit non seulement la valoriser, mais l’appuyer concrètement.
Former et guider les enseignants d’abord
Quelle approche pédagogique devrait être valorisée? Il n’y a pas si longtemps, l’approche behaviorisme dominait à l’école. Dans cet esprit, les enfants étaient des vases vides que le maître devait remplir de connaissances. La majorité des enseignants actuels ont été formés avec cette approche et ont développé des habitudes fortement ancrées.
Dans le nouveau programme, c’est plutôt l’approche socio-constructivisme qui est valorisée où l’élève, au centre de son apprentissage, construit ses savoirs en lien direct avec la société. Maintenant que les réseaux virtuels sont devenus aussi importants que les réseaux traditionnels, faudrait-il passer directement au connectivisme?
Les enseignants dans tout ça? Il ne faut pas s’étonner qu’ils aient peurs. Ils ne savent pas par quel bout commencer. Ils ne disposent d’aucun repère pour ce qui se présente comme opportunités, pour identifier les risques et pour réviser leur rôle. Tout est à construire.
En tant qu’immigrants technologiques, ils ont besoin d’être guidés pour apprivoiser cet environnement numérique, les nouveaux mode de collaboration en ligne, l’accès à toutes les bibliothèques du monde au bout des doigts, les interactions sociales sans présence physique, les outils pour se simplifier la vie en toute mobilité, …
L’école doit guider les enseignants afin qu’ils puissent à leur tour guider adéquatement leurs élèves.
Stimuler, nourrir, guider et évaluer les savoirs des élèves (étudiants)
Fini le temps où l’enseignant était un puits de savoir. L’enseignant devait pouvoir:
- stimuler l’intérêt et la curiosité de ses élèves dans des domaines diversifiés;
- nourrir leurs connaissances de base pour développer leurs compétences à décoder, à analyser et à communiquer un message avec le médium correspondant;
- les guider vers les sources de connaissances, de collaboration et d’outils d’apprentissage disponibles: dans l’école et en ligne. Il balise un chemin pour limiter les risques sans les éliminer.
- évaluer leurs savoirs, leurs savoirs-faire et leurs savoirs-être: dans la cours d’école et en ligne.
Comment alors concentrer l’enseignant à jouer ces rôles avec 20% de son temps? Lorsqu’un enseignant en passe 30% à faire des tâches connexes à l’enseignement et 50% à gérer les comportements des élèves, il ne lui reste qu’un maigre 20% pour les aider à se préparer pour leur avenir.
Le rôle de l’école, c’est aussi de fournir le cadre de travail et d’épanouissement aux personnes responsables de l’épanouissement de nos enfants.
Fournir un cadre
L’école doit fournir un cadre…
…aux enseignants pour pouvoir faire leur métier: enseigner. Enseigner c’est guider, transmettre, faire comprendre, tenter de rendre justice à chaque élève de sa classe, de lui apprendre à exploiter ses forces et compenser ses faiblesses. Laissons les enseignants enseigner. Leur travail n’en sera que plus bénéfique pour la société et pour leurs élèves.
…aux élèves(étudiants) pour les éduquer et leur apprendre les savoirs-vivre. Ils devraient pouvoir se développer d’un point de vue personnel, acquérir de la confiance en soi et apprendre à s’affirmer. L’école est une représentation encadrée de la société. Elle doit donc leur fournir ce dont ils auront besoin pour évoluer hors de ses murs.
…spatial: physique et numérique. Un lieu sécuritaire où l’apprentissage est valorisé. Ce lieu physique doit également permettre aux élèves d’être connectés avec l’environnement numérique, mais non moins réel: l’Internet.
…d’épanouissement intellectuel, social ET physique. Il ne s’agit pas uniquement de concentrer l’outillage du cerveau, mais du corps également. Les activités physiques, et surtout en plein air, permettent de développer la confiance en soi, d’oxygéner le cerveau, d’évoluer en équipe et de développer d’autres habilités. Les enfants ont besoin de bouger et d’établir ce lien essentiel avec la nature qui les entoure.
…dans les réseaux sociaux. Il ne faut pas les interdire, il faut les baliser. Il est fondamental de développer l’esprit critique des élèves sans les apeurer. Ils doivent pouvoir reconnaître les savoir-vivre constructifs des autres qui peuvent démolir (ex: cyber-intimidation, prédateurs sexuels, …). Pour encadrer les élèves avec efficacité, l’école se doit d’être en veille et en écoute constante sur le web.
…avec les outils adéquats!
Les “ordinausores” comme les appelleraient certains ou les “merdinateurs” comme dirait la grand-mère du petit Spirou ne suffisent déjà plus à suivre la parade. Il faut des connexions, un accès aux réseaux sociaux, aux milieux de collaboration en ligne, aux savoirs immenses dispersés sur le web. Pour les stimuler, il faudrait songer à mieux les équiper à l’école qu’à la maison.
Au secondaire, la moité des adolescents ont déjà un Iphone ou un Ipod touch. Pourquoi ne pas exploiter cette technologie qui est déjà dans les mains des jeunes? Au primaire, il faudrait un minimum pour chaque élève.
Plutôt qu’un TBI, pourquoi ne pas fourni une tablette informatique ou un ordinateur portatif avec accès à l’Internet à tous les élèves? Quel différence de coût y aurait-il entre un ordinateur portatif ou un tablette et les 20 duotangs, les 26 crayons/effaces, les cartables, les feuilles lignées et les cahier de toutes sortes? Il ne faut pas oublier que le pouvoir d’achat d’une école permettrait de fournir ces ordinateurs à un prix dérisoire par rapport au marché.
Toutefois, l’investissement des technologies sans révision des processus pédagogiques et la formation des enseignants/élèves(étudiants) n’apporterait pas les bénéfices escomptés et ne profiterait qu’aux lobby qui frappent à la porte des écoles (et de nos gouvernements).
Veiller et écouter!
Veiller, c’est rester à l’affût des connaissances et des tendances. Pour veiller, il faut savoir écouter. Pour écouter, il faut d’abord savoir décoder les messages qui nous parviennent. Et il est là le problème.
Avec tout le respect que nous avons et sans vouloir vexer personne, les dirigeants de nos écoles, formés majoritairement selon l’approche behaviorisme, ne disposent pas des bases cognitives élémentaires pour décoder les messages et les multiples mediums dans l’Internet. Passer du behaviorisme au connectivisme relève de l’acrobatie sans filet pour eux.
Comment alors peuvent-ils guider les enseignants à faire de même avec les élèves(étudiants)? Pour guider, il faut connaître le chemin ou, du moins, savoir “lire” une carte et le fonctionnement d’une boussole pour se diriger…à moins que ce soit le réseau “d’amis” qui fournisse la direction et qu’il faille plutôt utiliser un GPS programmable?
😉
Il importe que les dirigeants développent également leurs savoirs, leurs savoirs-faire et leur savoir-être pour veiller et écouter activement ce qui se passe; autant dans les écoles que dans les réseaux en ligne où leurs “membres” (enseignants et élèves/étudiants) communiquent entre eux.
Comme dirait Confucius: “J’entends et j’oublie. Je vois et je me souviens. Je fais et je comprends” Dans cet environnement où tout bouge si rapidement, il faudrait peut-être considérer laisser une place de choix à l’exploration et à l’expérimentation.
Explorer et s’ajuster!
La curiosité, la confiance en soi, la capacité de “lecture” et la disponibilité des savoirs sont les quatre conditions à l’auto-apprentissage. Comme une équipe est toujours à l’image de son chef, les dirigeants ne doivent pas avoir peurs d’explorer et de s’ajuster dans une démarche cybernétique.
Par exemple: un des grands enjeux de Facebook et de Google pour le monde des affaires est la personnalisation de l’approche publicitaire. Déjà, ce que nous écrivons et où nous le faisons sur le Web sont de puissants indices que nous leur fournissons pour nous faire “offrir” par richochet des promotions taillées sur mesure pour nous.
Si nous appliquions cette capacité de personnalisation publicitaire à l’approche pédagogique maintenant. Au lieu de “pousser” des connaissances aveuglément et par des algorithmes d’analyse du comportement en ligne d’un élève (étudiant), est-il possible de qualifier le niveau de curiosité, de confiance en soi et la capacité de “lecture” d’un sujet pour guider l’apprenant vers les sources de savoirs dans une approche plus individualisée à son rythme et dans son canal de communication préféré?
Autre piste d’exploration: comment pourrions-nous explorer la combinaison d’apprentissage à l’école et à la maison en alternance? Comment les parents pourraient-ils développer le plaisir d’assister leurs enfants? Que pensez-vous d’une approche par compagnons numériques ou par mentorat 2.0?
Au lieu de réinventer la roue et à l’instar de l’utilisation pédagogique de Twitter de Laurence Juin, quelles sont les autres expériences pouvant inspirer les dirigeants de nos écoles? Comment pourrions-nous les colliger et les organiser pour une consultation simple et intuitive pour tous les intervenants concernés?
Catalyser et animer (synergiser) les 1%
Individuellement, il est impossible de suivre l’évolution de cet environnement alimenté par des milliards d’individus et davantage de systèmes. Pourquoi ne pas le faire en réseau intelligent?
Plusieurs indices témoignent que, pour qu’un réseau social sur Internet soit vivant, il ne faut que 1% de “contributeurs” actifs. Parmi les dirigeants, les enseignants, les élèves(étudiants) et les parents, qui sont les 1% curieux et capable de “lire” les opportunités et les risques d’intégrer l’Internet au cœur des approches pédagogiques?
L’école doit également jouer ce rôle de catalyseur et d’animateur entre ces passionnés qui disposent de savoirs précieux pour la former et la guider à assumer tous les rôles que nous avons décrits précédemment.
Ces réseaux pourraient s’animer à trois niveaux:
- local et régional: . qui sont-ils? À cause de leur proximité géographique, ces réseaux pourraient constituer de puissant laboratoire pour l’animation et l’apprentissage “online”/ “offline”.
- provincial: qui sont les émules ou les dauphin des Mario Asselin, Sylvain Bérubé, Sébastien Paquet, Patrick Giroux,Ali Kinaze, l’auteur de La déséducation, les leaders de l’École entrepreneuriale…
- linguistique: qui sont ces leaders inspirés par tous les participants de Clair2010 et Clair 2011, Laurence Juin, Florence Meichel, François Guité, Roberto Gauvin,Christine Renaud, Jacques Cool, les membres actifs du réseau Apprendre2.0 et du programme des écoles communautaires du Nouveau Brunswick comme Alain Poitras. …
Quel est le rôle des élèves et des étudiants?
Betty “Qu’est-ce qu’elle attend de moi?” Mme Watson “La présence!”
Pas uniquement la présence physique, mais la présence intellectuelle pour écouter activement et pour participer à ce processus d’apprentissage en réseau. La qualité de cette présence peut certainement être affectée par les distractions qu’un ordinateur connecté à Internet peut nous offrir.
Si le “multi-tasking” est de plus en plus valorisé, les apprenants doivent également développer la capacité de juger de leur capacité à le gérer et l’importance d’une plus grande concentration pour la réalisation d’un travail de qualité. Sur une table d’opération, souhaitez-vous que votre chirurgien mette son statut Facebook à jour pendant qu’il vous opère?
Les parents et la communauté dans tout ça?
L’école ne doit pas être construite comme un silo, mais une composante active d’une communauté riche et vivante.
Même si leur implication est très variable selon leur niveau financier, leur culture et leur niveau de curiosité, ces fameux 1% doivent être au cœur de l’équation et non seulement être perçus comme une variable indésirable. Ils ne doivent pas remplacer la direction et les enseignants, mais être des “veilleurs” privilégiés et des “contributeurs” pour trouver les moyens de permettre à l’école d’assumer ses rôles.
Pourquoi pas des parents entrepreneurs? Ces derniers doivent également composer avec cet environnement organique qu’est l’Internet pour survivre et pour se développer. Quelles sont leurs découvertes qui pourraient bien servir leurs enfants et les écoles de leurs communautés? Nous en connaissons quelques uns qui seraient ravis d’être invités à bonifier votre réflexion et à parfaire vos savoirs liés à l’exploitation de cet environnement en toute intégrité.
Quel est le profil du “client” que l’école doit servir?
Loin de nous d’apporter une dimension mercantile à notre réflexion. Toutefois et comme l’Internet est un environnement où l’acheteur veut et peut diriger le dialogue, si nous considérions l’élève (étudiant) comme le client pour un moment?
En affaires, un client franchi toujours ces cinq(5) étapes à des vitesses variables peu importe qu’il achète un produit ou un service. Il doit:
- d’abord trouver un ou des fournisseurs pour répondre à son besoin
- le(s) qualifier pour n’en retenir qu’un
- transiger avec celui sélectionné
- utiliser le produit ou le service
- apprécier l’ensemble de l’expérience
Les entreprises doivent identifier les besoins et les requêtes de leurs clients à chacune de ces étapes et préparer les réponses correspondantes à être livrées au rythme des clients et dans leurs canaux de communication préférés c’est-à-dire là où ils s’expriment.
Est-ce que l’élève franchi ces mêmes étapes? Nous croyons que oui avec les nuances suivantes. Chaque élève, de façon explicite ou non, doit:
- Recevoir (“push”) les bases ou trouver (“pull”) les compléments de savoirs
- Qualifier et comprendre (sujet, source et médium)
- Acquérir les savoirs
- Les intégrer (utiliser) dans sa personnalité, ses processus et ses systèmes
- Évaluer (apprécier) l’expérience d’apprentissage.
Pour chacune de ces étapes, par matière (sujet), par niveau, selon l’âge et même le sexe, comment pouvons-nous qualifier le niveau de savoirs, de curiosité et de confiance pour ensuite déterminer quelles sont les meilleures approches pédagogiques et systèmes (outils, technologies) à utiliser? Pour parfaire leurs propres savoirs, cette analyse devrait se faire également pour les enseignants et pour les directions d’école.
Nous avons organisé ces paramètres dans une matrice que nous avons exposée à Clair2011 et qui a le potentiel de structurer un wiki des meilleures pratiques d’apprentissage intégrées par l’Internet. Elle pourrait constituer une grille d’amélioration continue des approches pédagogiques et de veille collaborative disponible pour tous les intéressés. Cette matrice permettrait également d’envisager des approches pédagogiques et un rythme d’acquisition des savoirs personnalisés.
À qui revient le rôle d’identifier les savoirs à acquérir?
Quelles sont les bases, les sujets, les langues, les références culturelles et historiques à promouvoir? Actuellement, cette responsabilité revient aux autorités ministérielles qui souffrent autant “d’illitératie” ou d’analphabétisme numérique que la majorité des membres du réseau actuel.
Nous croyons que ce rôle devrait revenir à ce réseau de 1% dans lequel des représentants de ces autorités et de communautés nés dans d’autres pays pourraient contribuer activement .
On veut bien, sauf que…
…il y a les rôles souhaités et il y a une réalité avec laquelle composer:
- Les professeurs surchargés
- Le double agenda des professionnels: leur attention est-elle concentrée entièrement au développement des savoirs des enfants ou à faire avancer leur carrière ou à compter les “dodos” avant leurs vacances ou leur retraite?
- Les intérêts des syndicats: est-ce que la carrière de leurs membres et les cotisations qu’elles reçoivent passent bien avant l’optimisation des savoirs des élèves(étudiants)?
- La gouvernance des commissions scolaires contribue à une certaine stagnation et consomme des argents qui seraient mieux investis à permettre aux écoles d’assumer pleinement leurs rôles et aux enseignants à s’améliorer en continue.
- La gestion des élèves/étudiants avec des troubles d’apprentissage: est-ce le rôle de l’enseignant, de l’école ou de la société à composer avec ce défi?
- Le désengagement des parents: est-ce le rôle de l’école, de l’enseignant ou de la société de compenser?
- La gestion des échecs. Nous sommes évalués sévèrement au quotidien dans la vie et les échecs sont une réalité avec laquelle composer. Par une baisse de la demande, les entreprises doivent réagir sinon elles disparaissent. Même s’il y a des coûts financiers et émotifs (fierté) associés aux échecs des élèves(étudiants), est-ce que les directions d’écoles cherchent à masquer ces échecs ou à les transformer en occasion d’actualiser l’approche pédagogique et/ou le cadre offert?
- Nous sommes confrontés à une culture d’individualisme et de droits de MA personne où la co-existence constitue tout un défi sur une planète qui se densifie et qui donne des signes d’essoufflement.
- Même si l’Internet élimine les frontières physiques, les programmes scolaires sont développés par référence géographique et non linguistique.
On efface le tableau et on recommence?
Le président Obama a récemment invité sa population à “Change the Equation” en matière d’éducation. Ne devrions-nous pas aller plus loin? Ne devrions-nous pas avoir le courage de peser sur les touches “Ctrl+Alt+Delete” et repartir sur une feuille blanche Google partagée?
Est-il possible de ré-inventer l’école sans détruire ses mûrs? Est-il possible d’accomplir une telle transformation à l’intérieur du système public? Nous en doutons si l’initiative vient des dirigeants actuels car leurs craintes et leur vitesse de progression constituerons de puissants freins.
Pour y parvenir, il faut intégrer la base dans l’équation: les enseignants et les élèves/étudiants. Les révolutions en Tunisie, en Egypte et, maintenant, en Libye ne sont que quelques exemples du pouvoir de la base lorsqu’elle décide de changer de cap.
Ces révolutions n’ont été possibles que par l’exploitation massive des réseaux sociaux qui ont transformé de multiples intentions individuelles en de puissantes actions collectives. L’école doit-elle attendre ce genre de révolution agressive ou stimuler une autre révolution tranquille en profondeur?
En tant qu’enseignante, ma fille ne peut changer le monde qu’une classe à la fois! En tant qu’entrepreneur, je crois qu’il est possible de rassembler et de synergiser les énergies positives pour y parvenir. Mais le temps presse; la révolution numérique est déjà en cours.
Comme a partagé avec justesse M. Jean-Claude Plourde en commentaire de ce billet: «Face au monde qui change, il vaut mieux penser le changement que changer le pansement» – Françis Blanche
Conclusion
Le principal rôle de l’école est de garder le focus sur l’acquisition du maximum de savoirs par les enfants d’abord: pas à protéger le système, les murs ou les carrières. Pour le faire en y intégrant la gestion des opportunités et des risques de l’Internet, l’école doit avoir le courage et intervenir en réseau pour reprogrammer les GPS (Gens – Processus – Systèmes).
L’établissement des orientations de l’école pour assumer ces rôles doit d’abord passer par un camp d’entraînement intensif de ses dirigeants. Pas uniquement sur le “comment” fonctionne la technologie, mais sur le “pourquoi” ça évolue aussi rapidement, sur les paramètres à considérer pour savoir “lire” les tendances et sur les “où” que ça se passe sur la planète.
Les dirigeants doivent comprendre que cet environnement où le “client” est roi se développe selon deux axes: la langue (humains et systèmes) et les intérêts…pas la géographie. Cette nouvelle réalité impose une révision de paradigmes et de modèles d’intervention.
Par exemple: pour actualiser les savoirs à devenir de meilleurs guides, il faudrait également pouvoir évaluer les enseignants et les directions d’école. Comme autre changement de paradigme, serait-il souhaitable de disposer de caméras pour suivre la dynamique de chaque classe pour mieux supporter le travail des enseignants et pour rassurer les parents?
Les directions d’écoles doivent convenir d’une vision en réseau à court, à moyen et à long terme. Pour les assister, il existe des pionniers qui ont exploré et qui continue de le faire. Ces pionniers devraient être reconnus et mieux organisés en réseau pour inspirer toutes les directions d’écoles dans les décisions fondamentales qu’elles doivent prendre.
L’Internet se développe en de multiples réseaux d’intérêts autour de langues communes. Il influence nos rapports “sur le terrain” et notre propre évolution. Avant de guider les enseignants et les élèves(étudiants) vers les bonnes sources et les technologies appropriées, il faut d’abord pouvoir les repérer et les qualifier. À la vitesse que tout évolue, ça ne peut se faire qu’en réseau intelligent.
L’école doit maintenant réfléchir et agir en réseau pour permettre à nos jeunes de savoir qualifier les opportunités et gérer les risques de cet environnement qui n’a pas fini de nous étonner. C’est en réseau que ce billet fut développé et c’est ainsi que nous souhaitons évoluer.
Les auteurs:
@myriamgendron – Étudiante à l’université de Montréal en enseignement primaire et préscolaire
@aryane (Luc Gendron) – Partager, qualifier et transiger dans l’Internet depuis 1996. Stratège, formateur et performant en développement des affaires Web internationales | Gens curieux – Processus Lean – Systèmes agiles
P.S. Vous ai-je dit que je suis fier de ma fille!
😉
Comments
7 réponses à “L’école: penser et agir en réseaux intelligents!”
[…] Note : dans une lignée similaire, mais adapté à une autre « industrie » je vous suggère l’excellent billet de Luc et Myriam Gendron sur l’école de demain. […]
Bonjour à vous tous et toutes,
Dans une vie antérieure, ils étaient «Paul de Cromery, Sieur de Maisonneuve» et «Jeanne-Mance» et nous pouvons vivre de leur immense héritage. Ce billet nous assure d’un nouvel héritage tout aussi important.
Magnifique article…
Salutations!
J-Claude
Quel que soit le pays ou le continent, je vois que nous connaissons les mêmes difficultés, les mêmes phénomènes de société et essayons de les résoudre comme nous pouvons.
Le constat que vous faites est identique au nôtre (en Belgique).
@Jean-Claude et @Lucy Désolé du délais à vous répondre. C’est un code 45 c’est-à-dire que le problème se situait à 45 cm de l’écran 😉
@Jean-Claude Merci pour cette belle marque de confiance. Nous croyons profondément que la solution à l’actualisation de notre système d’éducation passe par une réflexion et une action en réseau. Si les dirigeants en place ne peuvent y participer par peur ou par ignorance, nous espérons stimuler une autre révolution tranquille essentielle avec ces fameux 1% que nous continuons de découvrir.
@Lucy Merci pour votre commentaire. Nous pensons que cette actualisation qui s’impose ne peut pas être régionale, mais globale au sein d’un réseau de 1% de leaders partageant une même langue. Êtes-vous capable de les identifier dans votre coin de pays?
[…] fait, ce que à quoi je vous invite, c’est de penser et d’évoluer en réseaux. La simple lecture de ce texte peut stimuler votre intérêt, mais ne vous permettra pas de […]
Je suis particulièrement sensible au sujet que vous abordez, étant enseignante au cégep depuis maintenant 7 ans. Je crois que les technologies de l’information sont d’importants outils de soutien à l’enseignement, mais elles ne peuvent pas le remplacer. En effet, l’autorité d’un enseignant ne se mesure pas à sa capacité à jongler avec ces technologies, mais à l’expertise qu’il a développée dans son domaine, fruit de longues années d’études, de lectures, d’expériences, une expertise qui n’est aucunement substituable par un apprentissage que l’étudiant du secondaire ou du cégep ferait de façon autodidacte.
J’ajouterais même que ces technologies peuvent parfois entrer en contradiction avec l’enseignement. Par exemple, certains comportements appris par le biais des réseaux sociaux peuvent nuire à l’apprentissage, en ce sens que ces réseaux mettent en place un système de gratification immédiate: un message lancé sur Facebook obtient des réactions instantanées; on aime, on commente. On peut facilement en venir à “carburer” à ce type de satisfaction rapide. Or, l’enseignement a affaire avec le temps, la durée, l’attente… des valeurs aujourd’hui problématiques, surtout si on importe la logique entrepreneuriale dans le domaine de l’éducation et qu’on fait de l’étudiant un client. L’étudiant ne peut s’attendre à obtenir les réponses à toutes ses questions ici et maintenant; il doit accepter de ne pas tout comprendre immédiatement et reconnaître qu’apprendre ne peut pas toujours être une partie de plaisir. Apprendre est, au contraire, en partie un déplaisir en ce sens que c’est une violence faite à nos schèmes de pensée, c’est un bouleversement de notre vision du monde.
Aussi, je m’étonne de l’image de dinosaure technologique qui ressort de votre billet quand vient le temps de décrire les enseignants. Nous sommes nous-mêmes immergés dans cette culture du Web et non des « analphabètes » des TI en peine de comprendre un langage qui serait l’apanage de nos étudiants. La question qui nous préoccupe est comment concilier cette culture de l’immédiat avec les nécessités de l’enseignement qui a partie prenante avec la tradition, avec une pluralité de cultures qui ne peuvent être réduites à la simple culture du Web. Les TI peuvent être un point de départ pour créer un terrain de discussion avec les étudiants, mais elles doivent forcément mener ailleurs, beaucoup plus loin si on veut former un esprit critique, sans frontières.
Merci beaucoup madame Bergeron pour votre commentaire. Il transpire la passion que vous avez à enseigner auprès des jeunes. Il me permet de synergiser ma réflexion. J’aurais souhaité profiter d’une passionnée comme vous dans tous mes cours. J’espère que vous contaminez positivement vos collègues.
Je salue et j’endosse complètement votre vision à faire “de l’étudiant un client” afin de “former un esprit critique, sans frontières”.
Combien de membres de la direction (commissions scolaires et écoles) et d’enseignants pensent comme vous? Quelles sont les frontières et les zones de confort qu’ils ne souhaitent pas franchir? Combien de vos collègues ne livrent qu’un programme “emballé” sans véritable passion? Aux niveaux primaires et secondaires, combien de professeurs enseignent une matière pour laquelle ils n’ont pas été formé au départ? Combien de professeurs universitaires sont incapables de guider les futurs professeurs dans une société liée numériquement et mondialement par l’Internet? Pourquoi les jeunes garçons préfèrent les jeux numériques aux classes traditionnelles? Quelle est la valeur de l’inefficacité dans la gestion des commissions scolaires correspondant à un budget indisponible pour supporter l’actualisation des savoirs, l’innovation pédagogique et le travail des enseignants?
C’est justement aux frontières d’une institution pensée et développée à une époque où seul un professeur détenait le savoir que ce billet critique afin de stimuler les leaders à reprogrammer le GPS (Gens – Processus – Systèmes) en éducation au profit des apprenants.
Lorsque je fais référence à l’analphabétisme numérique en éducation, je ne fais pas référence à l’ignorance de certaines bases ou technologies, mais et surtout, aux nouvelles approches pédagogiques adaptées au rythme de l’apprenant qui émergent grâce à l’Internet.
L’internet n’est pas un outil, mais un environnement de communications entre les Gens et les Systèmes. Il permet d’accéder à tous les savoirs connus jusqu’ici. Il permet de découvrir des professeurs passionnés qui accompagnent les apprenants sans limitation d’un espace physique et de temps. Il permet une proximité temporelle que plusieurs professeurs, même dans une même classe, ne sont pas capables d’offrir aux “clients”.
Les outils ne remplaceront pas les enseignants, mais l’accès aux savoirs en modifient leur rôle. Les jeunes “allumés” souhaitent déjà avoir le contrôle sur le temps, l’espace et l’évaluation de leurs savoirs.
Avec une telle capacité d’accès, on ne parle plus seulement d’apprentissage, mais de possibilité de co-apprentissage. Des réseaux comme CLAIR- Voir l’éducation autrement et FOCUS20 constituent des environnements propices à l’amélioration des savoirs de celles et de ceux qui ont la curiosité ainsi que la volonté de les améliorer.
Connaissez-vous ces initiatives? “Design Thinking”, MOOC, Twitterature, Khan Academy
Pour compléter mes propos et bonifier votre réflexion, voici quelques conférences inspirantes:
Ken Robinson: Changing education paradigms (L’école a été développée à l’image des entreprises manufacturières…d’une autre époque. Est-ce encore pertinent?)
J’aime l’innovation, suis-je un virus?: Ron Canuel au TEDxDrummondvilleED (Le système d’éducation actuel produit des étudiants pour le contexte industriel de…1980)
RSA Animate – The Secret Powers of Time (
À toutes les 9 secondes aux États-Unis, il y a un décrocheur qui est majoritairement un garçon. À l’âge de 21 ans, il aura consacré en moyenne 10 000 heures devant un écran. Les leaders sont incapables de ni détecter, ni profiter de la reprogrammation de ces cerveaux)
“Gaming can make a better world” (Les jeux ne sont pas une plaie ou des “sirènes” de procrastination, mais un environnement méconnu qui inspire de plus en plus d’entreprises et de leaders mondialement)
Hackschooling Makes Me Happy: Logan LaPlante at TEDxUniversityofNevada (Pour ce jeune, “hacking” est un état d’esprit pour stimuler l’innovation. Il refuse la normalisation des modes de transmission des savoirs dans les écoles traditionnelles)
Choisir: Rachel Camiré au TEDxDrummondvilleED (Est-ce que les programmes des Cégep actuellement permettent à une telle leader d’avoir le contrôle sur le temps, l’espace et l’évaluation de ses apprentissages?)
Tout ce défi n’est pas une responsabilité du système de l’éducation, mais de toute la société. C’est ce qui stimule et passionne des leaders de la région de Drummondville à vouloir “penser en-dehors de la boîte” et nourrir cette synergie entreprises et éducation en TI
Il y a évidemment d’autres facteurs associés au décrochage scolaire non liés à la techno-pédagogie que je n’aborde pas et qu’il faille également considérer dans l’équation. Ce n’était pas l’objet du billet ni de ce blog.
Cependant, le statu-quo est inadmissible. Il faut véritablement identifier les Gens curieux avec un focus client pour penser et agir en réseaux intelligents afin d’actualiser le GPS en éducation au Québec.
Je serais très heureux de partager un café avec vous autour de ce sujet un jour 😉